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Rencontre avec Sophie de Baere

Rencontre avec Sophie de Baere

Sophie de Baere

Sophie de Baere vient de publier son premier roman « La Dérobée » aux Editions Anne Carrière. Après avoir étudié la philosophie, Sophie enseigne à Nice.

Sophie a accepté de répondre à mes questions. 🙂

AFDL : Bonjour Sophie, je vous remercie d’avoir accepté de répondre aux questions du blog Au Fil des Livres. Qui êtes- vous Sophie de Baere?

Sophie : J’ai 40 ans et je vis sur les hauteurs de Nice avec ma petite famille recomposée. Je suis également la maîtresse de charmants élèves d’une dizaine d’années dans une école élémentaire située sur les collines. Voilà pour l’état civil. Dans un registre plus personnel, je dirais que je suis une personne très contemplative ; j’ai besoin de l’odeur de la terre, du froissement des nuages, de l’âpreté du filet d’eau salée qui s’échoue sur la peau après la baignade. J’aime prendre le temps de l’observation et de la sensation et, pour le dire autrement, je troque volontiers un après-midi en centre commercial pour une balade champêtre dans l’arrière-pays. Je suis aussi une grande amoureuse et une amie fidèle. Les gens que j’aime me nourrissent. Eloignée depuis longtemps de ma famille, j’ai très vite ressenti la nécessité de créer un refuge d’amitiés capables d’abriter plaisirs, rires et conversations mais aussi entraide et réconfort. Enfin, je suis une mère et, le plus banalement du monde, j’aime plus que tout la candeur de mon fils et son souffle noué au mien quand il se love contre moi.

AFDL : Écrire, qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Sophie : Ecrire, c’est une parenthèse impérieuse. Une respiration. Ce moment paradoxal et inclassable où je suis« en vérité ». Ecrire, c’est un plaisir solitaire dans lequel je ne suis, au fond, jamais seule. Mes personnages me traversent de part en part, ils me racontent des histoires. J’écris pour cela : me raconter des histoires, celles que j’aurais aimé lire.

AFDL : Depuis quand écrivez-vous ?

Sophie : J’ai beaucoup écrit lorsque j’étais enfant. Les maîtresses s’amusaient à lire en classe mes récits fantastiques. J’inventais des pièces de théâtre, des bandes-dessinées, des revues. A l’adolescence, je me plaisais à rédiger un journal intime dans lequel je me délestais des petites cruautés quotidiennes. Et puis j’ai choisi d’étudier la philosophie et tout a changé. En pleine quête existentielle, je me suis mise à lire pour comprendre ; je n’étais plus dans la recherche de la vibration romanesque. J’ai cessé d’écrire. C’est revenu quelques années après la naissance de mon fils. J’ai d’abord commencé par écrire des textes de chansons mis en musique par mon compagnon ; ce projet de duo est finalement resté très confidentiel mais la machine était lancée. L’écriture est vite redevenue un besoin urgent. Absolu.

AFDL : Quand trouvez-vous le temps d’écrire ?

Sophie : Je suis une bordélique de l’écriture. Capable un jour d’écrire dix heures d’affilée et de ne plus rien produire pendant plusieurs semaines. En général, je profite des vacances et des soirées mais rien n’est défini. Alors que mon premier manuscrit a été un long accouchement sur plusieurs années, j’ai écrit La Dérobée en quelques mois, de manière intense, presque charnelle.  Quoiqu’il en soit, ce sont toujours des instants volés à ma famille, à mes proches, à mon travail. Je les vis souvent comme des moments illicites voire illégitimes.

AFDL : Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Sophie : J’observe beaucoup les gens autour de moi, je m’intéresse à leur manière d’appréhender l’existence, à leur psychologie. Je suis très à l’écoute, j’essaie de saisir un petit bout de la substance de chacun. Je suis comme ça depuis toujours et cette façon d’être au monde est devenue, avec le temps, un immense réservoir à histoires.

AFDL : Comment est né « La Dérobée » ? 

Sophie : J’ai envoyé un premier manuscrit, il y a quelques années, à une poignée d’éditeurs mais il n’a pas été retenu. Trop long, trop complexe pour un premier roman, m’a-t-on écrit. Heureusement, j’ai reçu une lettre pleine d’encouragements d’une célèbre éditrice qui m’a invitée à persévérer mais à raccourcir. J’ai donc rangé ce pavé et me suis remise au travail. En quelques mois, La Dérobée était née… Ce texte a d’abord émané d’une volonté : raconter l’éveil, l’épiphanie d’un être, c’est à dire sa compréhension soudaine de sa propre essence, de sa propre signification. A travers une succession de renoncements, de tempêtes à dépasser, de risques à oser, de seuils à franchir. Je voulais que Claire, ma narratrice, apprenne peu à peu, malgré les drames et les incertitudes, à ne plus vivre seulement à la lisière des choses. Le roman est en quelque sorte le récit d’un passage vers une vie plus authentique, plus résolue. A travers des images très sensibles, je voulais également fouiller les sensations physiques de Claire et ainsi rendre palpable la fugacité de ses émotions, être au plus près d’elle et de ses aller-retours incessants entre une existence réelle et une autre rêvée. Entre la banalité d’une vie conjugale rassurante et la nostalgie d’un passé puis d’un futur amoureux exaltés et souvent fantasmés. C’est au hasard d’une mise en contact par un ami que j’ai rencontré un agent. Il n’a pas eu le temps de proposer mon tout jeune manuscrit aux éditeurs de son réseau puisque, devenu quelques mois plus tard éditeur chez Anne Carrière, il m’a proposé un contrat. Je n’ai pas hésité car je me sentais en confiance ; je suis assez instinctive dans mes choix. 

AFDL : La promotion de votre roman commence, comment le vivez-vous ?

Sophie : De manière très attendue, je crois : à la fois impatiente et angoissée. Heureusement, le lendemain de ma première dédicace, juste après la sortie du livre, j’avais déjà de nombreux messages de lecteurs qui avaient « dévoré » mon livre le soir-même et m’en faisaient un retour très positif. Cela m’a permis d’être un peu moins fébrile ! Les réseaux sociaux sont formidables pour créer du lien avec les lecteurs et pour recueillir leurs impressions, ce qui est très précieux pour moi.

AFDL : Avez-vous de nouveaux projets d’écriture ?

Sophie : Oui, il y a quelques semaines, j’ai commencé à écrire un autre roman. 

AFDL : Quels sont les livres de votre PAL ?

Sophie : Les huit montagnes de Paolo Cognetti, Evariste de François Henri Désérable, Gabriële de Anne et Claire Berest, Les déraisons d’Odile D’Oultremont.

AFDL : Quels sont vos trois derniers livres « Coup de Cœur »?

Sophie : « Arrête avec tes mensonges » de Philippe Besson :  je n’avais jamais lu cet auteur et j’ai été littéralement submergée par l’émotion. Dans le monde rural et besogneux des années 80, cette histoire d’amour frénétique finalement empêchée par une peur indicible a résonné en moi. J’ai également beaucoup apprécié la lecture de « Faire mouche » de Vincent Almendros, un texte fort, oppressant, qui se lit, comme ses autres romans, d’une traite. Enfin, je viens de m’octroyer le plaisir de relire « Freedom » de Jonathan Franzen. Une fresque dense, captivante de bout en bout : de la littérature américaine comme j’aime !

AFDL : Un dernier mot ? 

Sophie : Je découvre depuis quelques jours le plaisir d’être lue ; c’est très émouvant. Merci à vous d’avoir lu La Dérobée et, plus largement, merci à tous les blogueurs littéraires pour votre travail foisonnant et passionné au service de la littérature.

Comme dirait mon éditeur,#lalittératurenapasditsonderniermot  🙂

 

5 réflexions au sujet de « Rencontre avec Sophie de Baere »

  1. Un peu surprise par le style dans les premières pages du roman, on est très vite «embarqué » dans l’histoire et l’intrigue.
    Bref j’ai bien aimé cette lecture, bravo Sophie.
    On attendra le prochain roman. Amitiés.

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