Une Femme au téléphone – Carole Fives
Editions Gallimard – Janvier 2017
Editions Folio – Mars 2018
Résumé
« Je tricote pour le petit. Je lui fais une écharpe avec une vieille pelote de laine qui me restait, j’ai voulu l’utiliser mais c’est trop épais pour moi, et puis la couleur est moche… Mais enfin du moment que c’est fait main, c’est bien. C’est combien de centimètres une écharpe pour un bébé ? Un mètre ? Tu es sûre ? Mais un mètre c’est énorme pour un bébé non ? »
Charlène, la soixantaine, est restée jeune. Mais quand le vide l’envahit soudain, elle enchaîne les appels téléphoniques à sa fille. Mère touchante et toxique à la fois, elle l’atteint toujours là où ça fait mal.
Mon Avis
Charlène appelle sa fille, le matin, le soir, la réveille, l’envahit, l’ennuie, la culpabilise, la dispute, la manipule, et recommence. Elle déverse son spleen – celui d’une femme ordinaire, solitaire et sexagénaire. La beauté s’enfuit, le regard des hommes change, la maladie s’affronte, la solitude pèse. Et puis il y a la petite retraite, la copine, les autres, les rencontres, l’hôpital, les souvenirs. La jeunesse s’envole charriant les soucis ; Charlène est incomprise, se sent négligée, même abandonnée. Elle voudrait qu’on l’écoute, elle qu’enfant on n’écoutait pas, qu’on lui prenne la main et qu’on l’aime. L’amour, elle en a donné et si peu reçu. Elle peint, tricote, surfe sur Tinder ou Adopte-un-mec et appelle encore. A qui d’autre pourrait-elle tout raconter ?
Le portrait est caustique et pourtant attachant. Derrière la mère se dessine la femme. Ses malheurs, ses tracas, sa vie qui se sauve, la peur au ventre. Ses mots sont cruels et assassins, tendres et aimants, ils passent de la vacherie à la gentillesse, comme les humeurs qu’elle ne maîtrise pas. Charlène est humaine, fragments assemblés de son histoire.
Ces bribes de conversation au son des dires de Charlène (et des réponses que l’on imagine de sa fille) s’étirent et résonnent sur des lectures que j’ai pu faire : « Rien ne s’oppose à la Nuit » de D.de Vigan, « Fugitive parce que Reine » de V.Huisman ou même « Eparse » de L.Balavoine. Les mères décrites sont toxiques, bi-polaires, engendrent des souffrances mais demeurent avant tout des femmes malheureuses qui font au mieux avec leurs propres difficultés. Des femmes qui finalement disparues manquent terriblement à leurs filles.
Cet écrit ne m’a pas fait rire comme B. Pivot (qui l’écrit sur la 4ème de couverture) mais m’a beaucoup émue.
Par ces appels téléphoniques se tracent toute la complexité des relations mère-fille, l’amour, la féminité, la vieillesse, la maladie.
Des mots d’une grande finesse.
Je vous propose de retrouver Carole Fives dans une interview ⇒ ICI
Avant même de l’avoir ouvert, ce livre me bouscule, me bouleverse. Aurai-je le courage de le lire ? Je ne sais pas encore. Parfois, à propos du choix de nos lectures, je me demande : est-il nécessaire de (excuser mon langage)… » remuer la m… » ? Peut-être que oui… peut-être que cela peut aider d’une certaine façon… mais pas au cours d’un si magnifique été ! 😀
Merci mille fois Bénédicte pour tous ces beaux articles ! 🙂
J’aimeJ’aime
Je pense en effet qu’il faut être dans une disposition adéquate avec ses lectures. On ne choisit pas tel ou tel sujet par hasard. Inutile de se contraindre à lire un livre qui va heurter … et peut être remettre à plus tard 😊😘
Merci pour tes commentaires qui me touchent à chaque fois ( j’ai même pensé à toi en faisant ma photo ! 😉)
J’aimeAimé par 1 personne
Petite pépite ce roman. J’ai ri et j’ai été émue aussi. Ton billet est touchant 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Merciiii ! Ravie que ce roman te plaise aussi. 😁😁😁😁
J’aimeJ’aime
décidément tu as vraiment été conquise par cette auteure! hâte de la découvrir avec son dernier roman qui m’attend!
J’aimeAimé par 1 personne
Ouiiiii ! J’espère que tu apprécieras ta lecture ! 😊😊
J’aimeAimé par 1 personne